Maïs ensilage Campagne 2023 : des teneurs record en amidon, mais une digestibilité en retrait
La qualité des rendements sur une large partie du territoire correspond à des maïs riches en amidon et en matière sèche particulièrement adaptés à des rations mixtes avec de l’ensilage d’herbe, selon le bilan 2023 d’Arvalis.
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Après un début de printemps frais et humide, les maïs ensilages ont profité des températures élevées de juin pour compenser en partie le retard pris à l’implantation. S’en est suivi un été marqué par l’absence de stress hydrique et thermique. Résultat : des rendements en hausse de 18 % par rapport à 2022, pour une moyenne nationale de 12,6 t de MS/ha.
Une fois n’est pas coutume, le pari d’un semis précoce ne s’est pas avéré payant. Ceux réalisés lors de la seconde quinzaine d’avril n’ont en effet pas été propices à une levée rapide, dans des sols souvent trop frais et humides.
Des conditions difficiles pour les semis précoces
Dans l’Ouest, surtout en Bretagne, mais aussi en Auvergne et Poitou-Charentes, ces premiers semis ont été touchés par des vers gris et la géomyze (dans l’Ouest), obligeant parfois à des ressemis. Toutefois, la majorité des semis ont été réalisés dans de bonnes conditions à partir du 5 mai. Ce report semble d’ailleurs avoir eu un impact positif sur les attaques de corvidés. La protection de semences avec du Korit pourrait aussi y avoir contribué. Ce fongicide aux propriétés répulsives n’a à ce jour pas d’alternative sur le marché offrant la même efficacité, alors que cette spécialité est classée T (toxique) donc à manipuler avec précaution. Sur la sellette, son autorisation est reconduite en 2024.
Les conditions météo de la deuxième partie du cycle de la plante se sont donc révélées très favorables à la mise en place et au remplissage du grain. Le ratio élevé épis/plante entière contribue nécessairement à augmenter la teneur en MS du fourrage récolté. De plus, les conditions clémentes ont permis de conserver des appareils végétatifs verts jusqu’à la récolte. Malgré ce stay-green de fin de cycle, l’avancée en maturité des grains contribue également à une teneur élevée en MS.
Sur le terrain, la teneur en MS moyenne est de 36 %. Plus de la moitié des chantiers ont été réalisés à plus de 35 % et un tiers à plus de 38 %, c’est-à-dire au-delà de l’objectif de 32-33 % de MS devant permettre de concilier rendement et valeur alimentaire. Un constat qui rappelle l’intérêt de se référer aux calculs de dates prévisionnelles de récolte. « La pratique qui consiste à retarder la récolte pour aller chercher un peu de rendement et maximiser l’amidon est intéressante en théorie. Mais, dans la pratique, elle n’est pas préconisée, car elle présente plus d’inconvénients que d’avantages. La récolte à surmaturité (< 35 % de MS) permet certes d’augmenter la part d’amidon, mais aux dépens de sa dégradabilité, de la digestibilité des fibres (NDF) et indirectement de la teneur en sucre du fourrage », indique Hugues Chauveau, ingénieur zootechnicien chez Arvalis.
Un maïs sec, très riche en amidon et pauvre en sucre
En effet, en fin de cycle, les sucres de la plante sont remobilisés vers le grain où ils sont synthétisés sous forme d’amidon. Les taux de sucre observés cette année sont ainsi en recul de 25 %. Or le sucre est aussi un moyen de stimuler les papilles et les fermentations du rumen. Surtout, la plus forte porosité des tas d’ensilage, induite par ces maïs secs, facilite la pénétration de l’oxygène rapidement et en profondeur dès l’ouverture du silo, réveillant l’activité néfaste des levures, champignons et autres moisissures. Les risques d’échauffement sont alors importants. « Respecter une vitesse d’avancement minimale de 15 cm/jour en hiver est la meilleure prévention. Dans les situations les plus à risque, la pulvérisation d’acide propionique au front d’attaque pendant la période de stabilisation peut s’avérer utile, mais contraignante. L’ajout d’additifs anti-échauffement à base d’acide propionique dans la ration est aussi un moyen de maintenir la stabilité anaérobie à l’auge », explique l’ingénieur agronome.
Un fourrage adapté aux rations riches en herbe
Les ensilages apparaissent particulièrement riches en amidon sur la bordure atlantique et dans le Nord, où les éleveurs sont habitués à travailler avec ce type de fourrages. Dans les zones intermédiaires, le Grand Est, les Pays de la Loire ou le Centre, ce sont des valeurs jamais vues depuis dix ans. Compte tenu d’un rapport épis/plante entière élevé, la quantité de fibres (NDF) est faible. La digestibilité de ces fibres (dNDF) est elle-même assez faible (49,8 % en moyenne), particulièrement sur la bordure de la Manche en raison d’un cycle végétatif plus long que dans d’autres régions. Globalement, le stade de récolte tardif a pu avoir un impact négatif sur la dNDF, ainsi que sur la teneur en sucre.
La forte proportion de grains permet néanmoins d’obtenir une bonne valeur alimentaire de 0,95 UFL/kg de MS en moyenne. Mais, dans la pratique, la valorisation de cette énergie pourrait être inférieure à celle attendue. D’abord, jusqu’à quatre-vingt-dix jours après la récolte, la valorisation de l’amidon n’a pu être que partielle : retenir qu’à cette période, l’ensilage ne fournit que 80 % au maximum de l’amidon indiqué par l’analyse (de 60 à 80 %). Plus globalement, l’efficacité alimentaire de maïs riches en amidon récoltés secs est souvent inférieure à la valeur théorique en raison des interactions digestives, « d’autant plus lorsque la part de maïs ensilage est importante dans la ration, rappelle Hugues Chauveau. L’ensilage d’herbe est un complément idéal pour ces maïs 2023 en apportant de la fibre NDF, mais aussi du sucre, ce qui n’est pas toujours le cas des premières coupes cette année ».
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